Date de publication : mercredi, Nov 03

Entretien avec M. Jean-François BROU, Directeur Général de la SOAGA

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Retrouvez dans le 5ème numéro de LA TENDANCE, un entretien avec le Directeur Général de la SOAGA, M. Jean-François BROU, qui nous donne son avis d’expert sur la mobilisation des ressources financières auprès des investisseurs institutionnels de la zone UEMOA et la nécessité d’améliorer l’éducation financière des populations.

L’année 2020 a affecté l’économie mondiale et les marchés financiers sur bien de plans. Cependant la Société Ouest Africaine de Gestion d’Actifs (SOAGA) s’est démarquée et a enregistré à fin décembre 2020, un actif net sous gestion de près de 50 milliards FCFA via ses fonds Épargne Sérénité, Épargne Actions, Épargne Active ou encore BOAD Capital Retraite (source Sika Finance). Qu’est ce qui explique cette performance ?
Les activités de la SOAGA connaissent effectivement une forte croissance à ce jour, mais il faut noter que cette croissance a été amorcée depuis plus de trois ans maintenant, grâce à une restructuration complète de l’organisation et des méthodes de travail de l’Institution.
Sous l’impulsion de son Conseil d’Administration, composé d’Institutions financières régionales de renom, la SOAGA a fait pivoter son business model pour se recentrer sur son cœur de métier.
La société s’est ainsi progressivement dotée d’une équipe jeune, compétente et dynamique et d’une plateforme technologique moderne, grâce auxquels elle a pu innover avec les lancements de cinq (05) fonds communs de placement.
Les très bonnes performances affichées pour les fonds de la SOAGA, dont les rendements nets aux investisseurs pour l’année 2020, vont de plus de 7,3% pour le fonds obligataire, à 17.69% pour le fonds actions, ont permis de convaincre investisseurs et épargnants, sur la qualité de notre gestion et de notre modèle opérationnel.
Ces bonnes performances, couplées à une bonne maîtrise des risques liés aux opérations de marché, ainsi qu’au dynamisme de notre équipe commerciale, nous permettent d’atteindre à fin juillet 2021, un encours sous gestion de plus 80 milliards FCFA.

Quelle est la stratégie de mobilisation des ressources financières auprès des investisseurs institutionnels pour la SOAGA et quels sont les défis rencontrés ?
Mobiliser des ressources financières dans l’Union, nécessite une stratégie d’innovation permettant de créer de nouveaux avantages compétitifs et une réelle valeur ajoutée pour les investisseurs et pour l’économie de notre région.
Notre approche à la SOAGA est principalement basée sur l’innovation par le service, afin de fidéliser nos investisseurs. Cela implique une véritable relation de proximité, qui débute par l’identification des besoins précis de nos clients, en termes d’épargne, de placement ou d’investissement, et cela, qu’ils soient institutionnels ou particuliers.
Cette approche transversale de conseil, nous permet de proposer les placements les plus adaptés aux objectifs individuels, qui comme vous le savez sont différents selon que l’on soit un investisseur institutionnel à fort budget ou un particulier avec une capacité d’épargne limitée.
Notre Leitmotiv est de créer une gestion collective qui tient compte de la particularité de chacun.

Pouvez-vous nous présenter la cartographie des investisseurs institutionnels avec qui vous travaillez ? Qui sont les plus gros acteurs ? Quels sont ceux qui viennent le moins et pourquoi ?
Le cœur de cible de notre activité est en effet constitué des institutionnels qui collectent également de l’épargne auprès du public. Nous pourrons citer à cet effet, les banques, les assureurs, les caisses de retraite, les réassureurs et les fonds de garantie.
Nous caressons l’ambition de développer une synergie avec différents acteurs du marché et également avec des fintechs, par la mise à disposition de services complémentaires ou d’offres communes dans le but de fournir aux investisseurs, des solutions novatrices, compréhensibles, accessibles et disponibles à un guichet unique.
L’un des défis majeurs auxquels nous sommes confrontés, reste la méconnaissance des produits financiers ou la défiance observée chez les investisseurs, toutes catégories confondues, vis-à-vis de la bourse.
Pour pallier cette situation, nous privilégions des actions de prospection, orientées vers les grandes entreprises et les PME de l’écosystème, qui détiennent de la trésorerie oisive ou qui recherchent tout simplement des supports de structuration ou de dynamisation de l’épargne salariale.

Tenant compte de la situation pandémique actuelle qui continue d’éprouver les populations, pouvez-vous nous indiquer, comment se porte l’épargne publique au sein de la zone UEMOA ?
Dans la situation pandémique que nous traversons depuis plus d’un an maintenant, nous avons pu observer une hausse progressive de l’épargne publique dans la zone UEMOA, qui est supérieure à ce qu’on a pu connaître à ce jour. Selon la BCEAO, les établissements de crédit de la zone UEMOA comptabiliseraient plus de 15 millions de comptes bancaires à fin décembre 2020, soit 1,8 million de nouveaux comptes comparés à 2019 (13,6 millions de comptes).
On note également une croissance de +12% des actifs gérés par les sociétés de gestion de la zone UEMOA passant d’une valeur estimée de 656 milliards FCFA à fin 2019 à 732,6 milliards FCFA à la fin de l’année 2020. En valeur, les FCP Obligataires sont dominants. L’attrait des performances offertes par les fonds obligataires sur un marché action en berne, expliquerait en grande partie cette progression. Les FCP Obligataires représentent 67% du total actif de l’union ; ils sont suivis des fonds diversifiés qui pèsent 30% et les fonds Actions pèsent quant à eux 3%.
Au-delà de la résilience des économies de l’Union, cette dynamique de croissance de l’épargne publique pourrait s’expliquer par plusieurs facteurs, notamment la modification des habitudes de consommation du fait de la limitation des déplacements, le manque de visibilité sur l’avenir et surtout la nécessité dans ces conditions de se créer une épargne de précaution.

Les missions premières de votre Institution sont de renforcer la collecte de l’épargne publique mais aussi proposer des produits financiers performants à sa clientèle. Parlant donc de produits financiers performants, quelle est votre analyse de ceux proposés par le Marché des Titres Publics ?
A la SOAGA, nous croyons fermement que la gestion de l’épargne publique est un enjeu majeur pour la stabilité économique et financière de nos États de la zone UEMOA.
Notre métier, la gestion d’actifs, aussi connue sous son nom anglais “asset management”, consiste à gérer et placer des capitaux dans le cadre d’une politique d’investissement définie au préalable et afin d’en maximiser le rendement.
Le Marché des Titres Publics propose essentiellement des produits de taux notamment les Bons et les Obligations Assimilables du Trésor. Ces produits sont les supports de placement des fonds les plus prisés par nos investisseurs institutionnels et nos épargnants particuliers au profil prudent, en raison de la prédictibilité des rendements.
Compte tenu de leur position dans notre zone économique, les investisseurs institutionnels sont traditionnellement risque-averses. De ce fait, ils ont une nette préférence pour les fonds purement obligataires ou à forte composition en obligations.
Notre premier fonds obligataire, le FCP SOAGA Epargne Sérénité a généré un rendement net annuel de plus de 7,5% sur les trois dernières années, en utilisant une stratégie d’investissement essentiellement basée sur le Marché des Titres Publics.
Les produits du Marché des Titres Publics nous aident donc à offrir à nos clients, la sécurité qu’ils recherchent tout en leur garantissant un rendement supérieur à celui des produits bancaires classiques. En cela nous sommes très heureux de l’appui de UMOA-Titres qui a apporté une meilleure organisation dans le secteur et qui nous fournit régulièrement des statistiques utiles à une prise de décisions éclairée.

La SOAGA travaille autant sur la rentabilité de l’épargne des particuliers que sur celle des placements des investisseurs institutionnels. Que pensez-vous du Marché des Titres Publics en tant que canal d’investissement pour ces deux profils ?
La gestion d’actifs devient un moteur majeur pour drainer l’épargne vers les marchés financiers et le financement des entreprises. Les clients de la SOAGA peuvent effectivement être segmentés en deux grandes catégories à savoir les particuliers et les institutionnels. A ces deux catégories correspondent des besoins qui ne sont pas toujours les mêmes.

  • Les institutionnels investissent une part de l’épargne publique qui a été collectée à travers leurs services. De ce fait, ils sont plus portés sur la préservation du capital que sur sa croissance. Les investisseurs institutionnels se tournent donc plus souvent vers les fonds purement obligataires ou à forte composition en obligations. Ces fonds investissent essentiellement sur les produits proposés par le Marché des Titres Publics. Les décisions sont plus faciles à prendre en raison de la prédictibilité des rendements et aussi de la disponibilité de statistiques fiables.
  • Les investisseurs particuliers quant à eux ont des profils très variés. Ils vont du plus prudent au plus offensif. Les investisseurs prudents réagissent comme les investisseurs institutionnels : ils sont plus intéressés par les fonds obligataires.

Au regard de ces profils, on peut dire que le Marché des Titres Publics est l’un de nos canaux d’investissement privilégié. Nous participons d’ailleurs régulièrement aux adjudications dans le but d’obtenir les meilleurs taux pour le profit de nos investisseurs.

Avez-vous des recommandations à proposer pour une meilleure collecte de l’épargne et donc pour une participation plus active des particuliers et des investisseurs institutionnels aux émissions de titres publics ?
Le Marché des Titres Publics dans sa configuration actuelle, fonctionne assez efficacement. Toutefois, il est assez difficile d’avoir une visibilité précise sur le marché secondaire. Les transactions étant dénouées en gré à gré, l’information ne circule pas en temps réel entre les investisseurs. Nous aimerions qu’à l’instar du marché financier (BRVM), la liste des transactions puisse être disponible pour chaque titre. Cela permettra aux investisseurs de prendre des décisions plus éclairées.
D’autre part, l’UT nous rend un grand service en produisant avant chaque émission des notes de pré-émissions qui résument en une seule page, les informations relatives à chaque émission. Cependant, ces notes ne sont rendues publiques qu’au dernier moment avant les adjudications. Le temps de prise de décision au sein des institutions financières pouvant parfois être long, il serait plus intéressant que ces notes soient disponibles 48h ou 72h avant les adjudications.

Que pensez-vous de la nécessité de l’éducation financière des populations par une vulgarisation des concepts financiers pour impacter entre autres l’épargne publique ?
L’épargne n’est pas un concept nouveau, nous devons réussir à expliquer aux investisseurs que notre rôle va au-delà de la collecte de l’épargne. Les sommes collectées auprès des investisseurs, sont orientées vers le financement des entreprises et de nos Etats pour l’amélioration des conditions de vie de tout un chacun.
La noblesse de notre métier, doit être expliquée dans un langage pluridimensionnel, qui consiste à s’adapter au niveau de compréhension de chacun, afin de susciter un plus grand engagement de la part de nos populations.
L’éducation financière des populations est ainsi une nécessité si l’on veut aboutir à une meilleure collecte de l’épargne et une meilleure utilisation de cette dernière au service du développement de notre zone économique. C’est d’ailleurs l’une des missions de la SOAGA et nous sommes actifs notamment à travers nos pages sur les réseaux sociaux, notre site internet ainsi que sur les radios et la presse locale.
Le but est de rendre l’information accessible au plus grand nombre, ce qui leur permettra de prendre de meilleures décisions. Nous participons, dans ce cadre, à de nombreuses actions de communication et de formation en espérant toucher à travers nos actions, l’ensemble des oubliés du système bancaire afin de mieux les sensibiliser sur les opportunités que constituent pour eux le marché financier.

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